Illustration d’une éjection de masse coronale, de la matière expulsée par le Soleil lors d’une éruption et qui peut être dirigée vers la Terre, où elle perturbe les réseaux électriques. Image ESA. Nasa. Soho. Lasco. EIT
Selon de nouvelles analyses, les rafales «extrêmes» produites par les éruptions solaires, qui endommagent nos satellites et réseaux électriques en balayant la Terre, se produisent tous les vingt-cinq ans en moyenne, et les tempêtes «sévères» tous les trois ans et demi.
Les tempêtes solaires «assez grosses pour causer des perturbations significatives de nos réseaux et systèmes électroniques arrivent en moyenne tous les vingt-cinq ans», selon une étude de l’université anglaise de Warwick. Le phénomène se produit lorsque le Soleil connaît une grosse éruption en surface qui éjecte du plasma dans l’espace. Ces rafales de particules mettent plusieurs jours à atteindre la Terre, où elles peuvent perturber le champ magnétique, irradier les satellites (entraînant la perte des signaux GPS, télé, radio…) et endommager les réseaux électriques.
Les scientifiques ont étudié les relevés de champ magnétique enregistrés à des points opposés de la Terre, au Royaume-Uni et en Australie, sur les 150 dernières années. Grâce à une nouvelle méthode d’analyse des données, ils ont pu remonter bien plus loin dans le temps qu’auparavant – ces 150 ans correspondent à quatorze cycles solaires de onze ans, alors qu’on étudie habituellement les cinq derniers cycles. Qu’ont-ils trouvé ? «Les tempêtes magnétiques “sévères” en provenance du Soleil se sont produites au cours de 42 des 150 dernières années», donc tous les trois ans et demi en moyenne, «et des tempêtes “extrêmes” sont arrivées six fois», soit en moyenne tous les vingt-cinq ans. Un exemple de tempête «extrême» est celle de 1989, qui a causé une large panne électrique au Canada.
Richard Home, qui travaille dans une base scientifique britannique en Antarctique, explique que «notre étude montre qu’une super-tempête peut arriver plus souvent qu’on ne le pensait. Et il ne faut pas se laisser tromper par ces moyennes statistiques : cela peut se produire n’importe quand et on ne sait pas le prédire». La prochaine tempête solaire dirigée vers la Terre peut se déclarer dans trente ans… ou demain.
En juillet 2012, on l’a échappé belle : la Terre a failli traverser une zone de l’espace fraîchement balayée par une énorme tempête solaire. «Si l’éruption s’était produite une semaine plus tôt, la Terre aurait été en ligne de mire», expliquait le scientifique Daniel Baker à la Nasa. Les conséquences auraient été catastrophiques au niveau mondial, coûtant des milliards d’euros et nécessitant plusieurs années, peut-être une décennie, de réparations.
De nombreux travaux sont en cours pour tenter d’anticiper les tempêtes solaires qui vont toucher la Terre et mieux se préparer à leur arrivée. L’Agence spatiale européenne (ESA), par exemple, prévoit de lancer en 2025 un satellite au point de Lagrange n°5, qui permet d’observer un côté du Soleil invisible depuis la Terre et de repérer les éruptions le plus tôt possible.
- Par Camille Gévaudan — Libération, 4 février 2020 à 15:40.